samedi 4 juin 2016

Rattrapages cannois, 4 : The Strangers, Victoria


The Strangers, de Na Hong-Jin
Le film commence comme du Bong Joon-Ho (une enquête sur une série de meurtre dans un village coréen) et se termine comme un film de zombie. Du cinéma de genre, sur lequel il s'appuie sans en avoir l'air, Na Hong-Jin tire deux idées obsédantes : la peur de la contamination et un doute radical quant à la nature des êtres. L'enquête policière initiale, dont l'objet est de savoir qui est le coupable, est peu à peu détournée au profit d'une enquête métaphysique sur l'origine des crimes : par quoi sont animé ceux qui les commettent, et y a-t-il un coupable ? Une invisible transition remplace les policiers par des prêtres et des chamans (qui du diable au fantôme se disputent implicitement le mystère du mal), et le polar se mue en film d'horreur. Les jeux de montage de la dernière partie, au lieu de résoudre le mystère, systématisent le doute en multipliant les fausses pistes. L'intérêt du film est vraiment là, dans cette idée (suggérée en exergue) que l'effroi peut venir simplement du caractère équivoque de l'apparence des autres : sain ou possédé, humain ou fantôme, esprit ou démon. 


Victoria, de Justine Triet
Une vraie comédie romantique, jouant avec les canons du genre et le double impératif d'efficacité comique et sentimentale. Mais si l'opération est réussie, c'est aussi que Triet dévie légèrement du schéma classique : son film parle autant d'amour que de dépression, avec une tonalité qui fait parfois penser aux films de Salvadori. La conséquence est très concrète dans la construction du film, qui, au lieu de ménager ses effets en alternant les hauts, les bas et les faux plats, nous montre au contraire un personnage chuter quasiment jusqu'à la fin (Victoria plaisante à un moment en disant que même au fond il n'y a pas de fond). Le monde de Victoria est une version cauchemardesque de la vie parisienne d'aujourd'hui, où il y a des enfants dont on ne sait pas trop quoi faire, des plans Tinder embarrassants, de la solitude et des animaux dont on se demande pourquoi ils sont là.

1 commentaire:

  1. Une comédie romantique comme on les aime : fraîche et légère. Ce film nous redonne le sourire.

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