
dimanche 13 février 2011
Le goût de l'invisible - Au-delà, de Clint Eastwood

samedi 20 novembre 2010
Back to the XXth century - Unstoppable, de Tony Scott

vendredi 4 septembre 2009
Inglorious Basterds, de Tarantino - le comique, c'est du sérieux.

mercredi 5 août 2009
Questionnaire cinéphile
1) Quel est votre second film favori de Stanley Kubrick ?
Barry Lindon
2) Quelle est l'innovation la plus significative / importante / intéressante dans le cinéma de la dernière décade (pour le meilleur ou pour le pire) ?
Les plans et la bande-son de Gerry.
3) Bronco Billy (Clint Eastwood) ou Buffalo Bill Cody (Paul Newman)?
Bronco Billy
4) Meilleur film de 1949.
I Was a Male War Bride (Allez coucher ailleurs)
5) Joseph Tura (Jack Benny) ou Oscar Jaffe (John Barrymore)?
Joseph Tura!
6) Le style de mise en scène caméra au poing et cadre tremblé est-il devenu un cliché visuel ?
C'est un procédé comme un autre.
7) Quel est le premier film en langue étrangère que vous ayez vu ?
Le premier dont je me souviens, c'est les Enchaînés de Hitchcock
8) Charlie Chan (Warner Oland) ou Mr. Moto (Peter Lorre)?
Peter Lorre, sans connaître les films en question.
9) Citez votre film traitant de la seconde guerre mondiale préféré (période 1950-1970).
La Grande vadrouille (c'est dire mon amour pour les films de guerre).
10) Citez votre animal préféré dans un film.
Le léopard de Bringing up baby.
11) Qui ou quelqu'en soit le fautif, citez un moment irresponsable dans le cinéma.
Tarantino récompensant Michael Moore.
12) Meilleur film de 1969.
La Sirène du Mississipi, de Truffaut.
13) Dernier film vu en salles, et en DVD ou Blu-ray.
En salle : Prends l'oseille et tire toi, en dvd la Horde sauvage, de Peckimpah.
14) Quel est votre second film favori de Robert Altman ?
The Player
15) Quelle est votre source indépendante et favorite pour lire sur le cinéma, imprimé ou en ligne ?
Les blog cités dans ma liste, puis des revues, quand un sujet me tape à l'oeil.
16) Qui gagne ? Angela Mao ou Meiko Kaji ?
Je passe.
17) Mona Lisa Vito (Marisa Tomei) ou Olive Neal (Jennifer Tilly)?
A l'estime des apparences, je dirais Mona Lisa Vito.
18) Citez votre film favori incluant une scène ou un décor de fête foraine.
Sudden Impact, de Clint Eastwood.
19) Quel est à aujourd'hui la meilleure utilisation de la video haute-definition sur grand écran ?
Je suis encore sous le choc de l'avant-dernière séquence de Public Ennemies.20) Citez votre film favori qui soit à la fois un film de genre et une déconstruction ou un hommage à ce même genre.
Presque toutes les bonnes comédies musicales, de Tous en scène à All that jazz, mais comme ce n'est pas du jeu de dire ça, je me prononce pour New York, New York de Scorsese.
21) Meilleur film de 1979.
La Vie de Brian, des Monty Python
22) Quelle est la plus réaliste / Sincère description de la vie d'une petite ville dans un film ?
I Vitelloni, de Fellini.
23) Citez la meilleure créature dans un film d'horreur (à l'exception de monstres géants).
La mouche en cours de mutation, dans le film de Cronemberg. Dégoutant.
24) Quel est votre second film favori de Francis Ford Coppola ?
Le parrain 2.
25) Citez un film qui aurait pu engendrer une franchise dont vous auriez eu envie de voir les épisodes.
Disons Le Magnifique, de Philippe de Broca.
26) Votre sequence favorite d'un film de Brian De Palma.
Les vraies fausses révélation de Jon Voight à Tom Cruise dans Mission Impossible, avec un flash back qui montre autre chose que ce qui se dit.
27) Citez votre moment préféré en Technicolor.
Le numéro d'un Américain à Paris autour de la fontaine (Minnelli, 1951)
28) Votre film signé Alan Smithee préféré.
Pas vu.
29) Crash Davis (Kevin Costner) ou Morris Buttermaker (Walter Matthau)?
Kevin Costner, parce que j'aime bien l'acteur.
30) Quel film post-Crimes et délits de Woody Allen préférez vous ?
Match point, avec une mention spéciale pour Scarlett Johansson.
31) Meilleur film de 1999.
Big Daddy, de Dennis Dugan, avec Adam Sandler.
32) Réplique préférée. (Apparemment Vincent modifie sa traduction, pour en faire "slogan de film préféré". Je réponds aux deux questions.)
-la réplique: -Tu es infame. - Je ne suis pas infame, je suis une femme. (Une femme est une femme - et non A bout de souffle comme indiqué au départ, contre toute logique. Merci Père Delauche.)
-Le slogan sur l'affiche de Manpower, de Raoul Walsh (1941): "Robinson - He's mad about Dietrich. Dietrich - She's mad about Raft. Raft - He's mad about the whole thing."
33) Western de série B préféré.
Je me familiarise pour l'instant avec ceux de la série A, tout en gardant au frais ceux de la B.
34) Quel est selon vous l'auteur le mieux servi par l'adaptation de son oeuvre au cinéma?
Je donne ma langue au chat. Aucun exemple ne me vient à l'esprit.
35) Susan Vance (Katharine Hepburn) ou Irene Bullock (Carole Lombard)?
Susan Vance, pour (mais pas seulement!) ne pas dépareiller avec la question 10.
36) Quel est votre numéro musical préféré dans un film non musical ?
Jeanne Moreau dans Jules et Jim.
37) Bruno (Le personnage si vous n'avez pas vu le film, ou le film si vous l'avez vu) : une satire subversive ou un ou un stéréotype ?
Je serais tenté de dire stéréotype en devenir. Mais je n'ai pas vu le film.
38) Citez cinq personnes du cinéma, mortes ou vivantes, que vous auriez aimé rencontrer.
François Truffaut (pour qu'il parle avec son ton de faux calme), Fred Astaire (pour qu'il m'apprenne comment il fait), Andreï Tarkovski (pour qu'il me fasse un cours magistral) - voilà pour le monde des morts -, puis Steve Carell (il faut bien rire un peu) et Pavel Lounguine (pour discuter de la Russie) - voilà pour celui des vivants.
lundi 20 juillet 2009
L'anniversaire de Leila, de Rashid Masharawi

samedi 18 juillet 2009
Une étoile est née, de George Cukor - Hollywood sans voile

James Mason, dans le rôle de Norman Maine, est malade d'images plus que d'alcool. Il faut voir le même acteur dépendant à la cortisone dans Bigger than life, de Nicholas Ray - le titre français, Derrière le miroir, dit encore mieux la chose - pour comprendre quel genre de mal il a su exprimer à l'écran. Précisément, cette comédie musicale avec Judy Garland, plus encore que les autres avant, nous fait regarder à travers les mailles du genre, par l'intermédiaire, révélateur, de Mason qui y joue un personnage fondamentalement ambivalent. A la fois l'amoureux, celui qui a les yeux purs du spectateur pieux et fervent, et la créature morbide du système hollywoodien, celui qui brise le miroir et nous laisse entrevoir la folle mécanique. En cela, Norman Maine est le film lui-même.
Truffaut aimait parler de "grands films malades", et il n'y a qu'à regarder la longue cicatrice privant le film de quelques bonnnes minutes pour lui accorder ce statut. Judy Garland, dont ce film raconte aussi un peu la vie, offre de grands numéro en même temps qu'une espèce de maladresse. Il est poignant de voir la façon dont A star is born, par le fait même que c'est un film boiteux, avec des moments de vague tranchant sur des séquences magnifiques, est devenu contre la volonté de son réalisateur, le témoignage vivant de ce qu'il voulait montrer.
lundi 13 juillet 2009
Public Ennemies, de Michael Mann - d'où l'on vient et où l'on va

Chose surprenante: s'il est un doux rêveur, le personnage brillament incarné par Johnny Depp ne rêve pas, ou que brièvement, à un après idyllique. Pas de futur impossible, cette fois, ni de projection en trompe-l'oeil, comme on en trouve tout le temps chez Mann - que l'on songe aux projets éternellement en suspens du taxi Max de Collateral, ou aux envies de fuite du personnage de De Niro dans Heat. Plus que ça, les intentions de Dillenger resteront pour nous quasiment opaques, en ce que nous le verrons à peine se représenter sa vie future, ou tout au moins les issues possibles. Pour la simple raison que ceux qui s'occupent de cela pour lui, ceux qui s'occupent de représenter, de cadrer, de cerner quelque chose ou quelqu'un, ce sont cette fois les flics, et plus précisément l'un d'entre eux: Melvin Purvis. Il y a à ce titre une scène typique de chasse à l'homme, où le personnage de Christian Bale vise son brigand gibier (un certain Pretty Boy Floyd) à travers les rangées parallèles d'un verger. Le plan a ceci de significatif qu'il donne l'impression que le fuyard, filmé de dos, fait du surplace alors qu'il est en train de courir à toutes jambes. Voici le genre de représentation qui détermine la trame de Public Ennemies: une visée annulant toute profondeur de champ, une ligne de mire interdisant toute perspective de fuite.
Le Dillinger de Michael Mann a, pour nous qui le voyons et pour ceux qui le poursuivent, un aspect insaisissable, hors du cadre. D'ailleurs, le scénario simplissime fonctionne sur un ressort unique et obsessionnel: il fuit, on le retrouve, fussillade, il s'échappe. Il a en face de lui, nous l'avons dit, des gens qui n'ont de cesse de le cadrer, de le représenter comme on mettrait en cage. C'est l'imagerie de la modernité - oppressante comme ces téléphones, ces cables, ces branchements, ces standardistes en bras de chemise, que l'on rencontre à la fois à l'endroit où la police met sur écoute et dans l'antre de l'organisation criminelle. L'imagerie moderne, c'est aussi le mur sur lequel Dillinger se voit représenté avec ses complices, presque tous morts, c'est indiqué sur les photos - de toute façon, on se le dit et peut-être qu'il se le dit aussi, on ne reste pas longtemps vivant lorsqu'on est en photo sur ce mur, c'est bien le principe.
Toute image n'a pas forcément cette odeur de mort. Car il y a bien du rêve, de la projection, dans la relation qui unit notre héros à Billie Frechette (Marion Cotillard). Quand tout le monde se soucie "d'où l'on vient", lui dit-il, il préfère accorder de l'importance à "où l'on va". Ce qu'il propose à Billie, c'est la vie d'aventure qu'il a déjà, ici et maintenant, dans cette trajectoire qui relie le passé au futur. Un rêve éveillé qui n'a pas pour lieu un improbable futur, mais un présent radical, entier et concret. Et ce rêve magnifique a tous les attraits du travail de Mann sur le numérique: une image trop précise, presque télévisuelle, que le cinéaste transforme en matériau pour des séquences impressionnistes - ce sont les pluies de flash et de fumigène, les décharges de lumière des mitraillettes, ou les jeux de phare et de reflet sur les voitures luisantes.
D'ailleurs le peuple ne s'y trompe pas, qui fait de lui un héros romantique, un Robin des bois moderne. Car avec le versant positif de la représentation, il y a le cinéma et la mythologie. A la fin, Dillinger va voir Manhattan Melodrama où il voit Clark Gable marchant fièrement vers son exécution. La scène qui suivra, celle de sa propre fin, aura peu à envier au cinéma d'antan. Il fallait cela, il fallait mourir en beauté, comme au cinéma, pour entrer dans la légende.
dimanche 12 juillet 2009
Whatever works - New-York est revenu!

lundi 6 juillet 2009
Jeux de pouvoir: héros chevelu pour histoire échevelée

Avant même les rebondissements d'une intrigue prenante, avant même l'esthétique (vintage, elle aussi), c'est le vocabulaire et les dialogues qu'il faudrait analyser. Entre Russel Crowe (le journaliste chevelu) et la responsable du site Internet du journal en question, entre ce même chevelu et la directrice du journal, entre tous ces journalistes et la police, il y a un grand débat lexical. "Comment appelle-t-on ce qu'on est en train de faire?" semblent vouloir récapituler épisodiquement les protagonistes. Dans la mêlée, on entend investigation, gossip, facts, blog, truth, case, scoop et - celui qui finira par s'imposer - story.
Peut-être voyez vous où j'en viens: la question de la presse d'investigation est intéressante, ici, dans la mesure où sa capacité à raconter une histoire est en question. Son autorité, en somme. Aussi l'intérêt de Jeux de pouvoir est-il moins dans les révélation, plutôt communes, mais dans cette histoire qui, sous couvert de rebondissements, met en question sa propre autorité, sa propre légitimité, comme Russel Crowe doutant de son ami. Et c'est aussi le thriller politique qui, avec Mc Donald, ne se fait guère d'illusion sur sa portée, qui n'est guère que celle du divertissement nostalgique.
lundi 8 juin 2009
El Dorado, de Howard Hawks - misères de l'impuissance

Le cow-boy est par excellence celui qui fait, celui qui exécute, c'est ce que nous nous disions à propos de L'Homme de la Plaine, d'Anthony Mann. Reliquats du western classique, John Wayne et Robert Mitchum sont deux variations de cette figure de puissance. L'un est chasseur de primes - force sauvage, mercenaire, mise au service du bien - l'autre est shériff - c'est-à-dire seule puissance vraiment légitime. Entre eux, dès le début, et en guise de présentation, il y a un fusil qui, une fois la tension lâchée, passera de mains en mains, comme entre frères d'arme.
Mais John Wayne et Robert Mitchum sont déjà deux vieux. Et ils sont travaillés de l'intérieur, l'un par une balle reçue (d'une femme!), l'autre par l'alcool. Impuissance et paralysie dévorent petit à petit les deux compères. En lieu et place de son revolver, Mitchum se retrouve bouteille en main, au saloon, alors qu'il est provoqué et moqué par ses adversaires. Quant à John Wayne, il doit littéralement passer l'arme à gauche pour en imposer encore un peu. Tous ces petits ennuis d'impuissance, qui gangrènent l'action de ce western, ressemblent à des signes. Le film date de 1966, on est déjà dans les sixties, et le passage de la puissance à l'acte commence déjà à se dérégler, de l'autre côté de l'écran.
La puissance est toujours au western question d'armes. Aussi, du couteau au pétaradant pistolet, James Caan apporte-t-il sa jeunesse au film d'Howard Hawks. Voici des gestes neufs, inattendus - comme lorsqu'il se jette sous les chevaux pour attaquer les cavaliers - en même temps qu'explosifs et parfois approximatifs (son pistolet semble éclater à chaque fois qu'il tire et il blesse à la fin John Wayne par erreur...)
Toute cette jeunesse ne nous enlèvera pas l'impression que la figure du cow-boy a été atteinte. Peut-être est-ce avec El Dorado qu'aura fait son apparition le western rongé par sa propre fin tel que nous le connaîtrons, au moins, jusqu'à Unforgiven?
samedi 30 mai 2009
Regardant pour Eric (Looking for Eric)

Cela donne une première partie assez jouissive, où l'on fait connaissance avec le Cantona personnel d'un Eric Bishop pas bien dans ses baskets. Dans ces dialogues improbables, souvent très amusants, se mêlent les ennuis du facteur déprimé, avec sa passion: le football et Eric Cantona. Puis au milieu du film se développe l'intrigue parallèle d'un beau-fils embringué dans une histoire de mafia et de flingue à cacher. D'un seul coup c'est le chaos, il y a des flics, ça crie... Ils étaient tout de même plus paisibles, les proverbes de Cantona. La seule utilité de cette complication dramatique est sa résolution, l'amusante "opération Cantona", qui est à l'image du film: une gentille comédie qui cherche un peu trop à être prise au sérieux.
Sur le film, voir les avis autrement plus constructifs de Nightswimming, et de Inisfree.
vendredi 29 mai 2009
Sergeant York, de Howard Hawks - Voyage au bout de la gloire



mardi 26 mai 2009
La Nuit au musée, 2 - l'Amérique nostalgique

dimanche 24 mai 2009
L'Homme de la plaine, d'Anthony Mann - le paradoxe du cow-boy

Dans L'Homme de la plaine (Anthony Mann, 1955), James Stewart incarne parfaitement ce paradoxe. Il y a d'un côté le convoyeur venu livrer de la marchandise, celui qui se bat et mord la poussière. De l'autre, il y a un homme aux motifs mystérieux, dont on ne se figure ce qu'il et venu faire en ces terres hostiles que par allusions - par exemple les restes calcinés d'une patrouille de Cavalerie, au début du film. Lockart (Jimmy Stewart) est ici à la fois l'homme qui met les pieds dans le plat, provoque les bagarres, déclenche la catastrophe et l'étranger de passage, à peine arrivé et bientôt reparti, celui qui disparaîtra sans qu'on ne saisisse vraiment qui il est.
Le cow-boy est un insaisissable. Un personnage qui accomplit bien plus qu'il ne s'accomplit. Il est l'action pure et l'inachevé en personne. Il est la raison d'être de l'histoire et pourtant il y participe à peine. Dans un western, le cow-boy est le récit même.
C'est que, plus qu'acteur, le cow-boy joue souvent ce rôle d'agent révélateur. Le personnage féminin s'interroge, dans L'Homme de la plaine: "Que serait-il arrivé si vous n'étiez pas venu?" Toute la question est là en effet. Toutes ces querelles sourdes et ces haines latentes étaient déjà là, mais c'est pourtant notre personnage qui les fait exister, éclater. Sergio Leone puis Clint Eastwood sauront bien reprendre à leur compte cette caractéristique. Avec notamment, pour le second, Pale Rider et L'Homme des hautes-plaines - le cow-boy est auréolé d'une aura mystique, puisque son action pure est révélatrice, apocalyptique.
Dans le film d'Anthony Mann, la tension entre la puissance et l'acte - les émotions et l'action - est magnifiquement figurée par le fusil, cet objet autour duquel tourne toute l'intrigue. Une arme d'attaque et de dissuasion dont la détente a été pressée une fois, à l'origine, pour tuer le petit frère de Lockart et donner lieu à l'histoire.
Almodovar: Etreintes brisées

S'opposaient, dans Volver, deux visions de l'image. Ces deux cinémas distincts étaient celui de papa, qu'il s'agissait de tuer - car il était celui du désir dérivé et incestueux - et le cinéma maternel, celui de l'émotion et du recueillement familial. Il y a des films obscènes, d'autres émouvants, tout l'art tient dans la gestion de l'émotion. Ce schéma se complexifie sérieusement dans Etreintes brisées. D'une part parce que le sujet devient bien plus explicitement le cinéma, d'autre part parce que les propositions visuelles, ainsi que les supports, se démultiplient.
D'abord le nouveau film d'Almodovar parle beaucoup de cinéma. Un peu trop. Le héros est un scénariste - un cinéaste devenu aveugle -, Penelope Cruz est une actrice (au sens large), transformée en Audrey Hepburn par son amant adorateur. La moitié du film concerne un tournage, tournage lui-même filmé par le fils du producteur, un producteur accessoirement mari de Lena (Penelope Cruz). Au-delà de cela il y a beaucoup de genres qui se rencontrent, principalement le thriller et le mélodrame. Almodovar marie tout ça avec une certaine virtuosité, il faut le dire. Et son actrice semble porter sur elle toute l'histoire du cinéma, la pauvre. Il y a cette scène de séance photo où elle porte une perruque blond platine, ainsi que, ironie du sort, des yeux en boucles d'oreilles. Comme si l'actrice, l'objet de tous le regards, rendait la pareille à tous ses spectateurs - et compensait la cécité future de l'artiste.

Avec les histoires qui se croisent et se répondent, ce sont différentes façons de voir et de mettre en scène qui sont montrées. En gros, on en distingue trois: celle de Martel, le mari richississime de Lena (c'est le cinéma du vieux, le cinéma-mort, la dictature du producteur), celle de Harry Caine (alias Mateo, le cinéaste amoureux, l'artiste), celui d'Ernesto (l'ambigu qui filme tout, finalement sauvé, mais qui sert l'un, puis l'autre). Ce qui est réussi, dans ce jeu d'images, c'est la façon dont est montré un cinéaste essayant de sauver un film pour mieux comprendre sa vie. Un peu moins réussie, en revanche, est la manière de vouloir toucher en même temps l'émotion et l'intelligence d'un spectateur qui, du coup, restera toujours un peu en dehors de ce puzzle pop-art.
lundi 18 mai 2009
Greta Garbo: la Dame aux caméras

mercredi 6 mai 2009
Still walking - la marche des rituels et les rituels de la marche

Bizarrement, si Still Walking est un beau film, c'est comme malgré son projet. Malgré le motif initial que l'on devine plus ou moins, et qui revient en gros à donner à voir l'entrelac émotionel caché derrière les rituels familiaux. J'ai été plus ému par les rituels que par les sentiments. Les moments les mieux filmés sont les instants gratuits, ceux où les enfants jouent par exemple. Il y a aussi les marches, dont les points d'arrivée et de départ importent peu, des marches qui se ressemblent car elles sont toujours la preuve qu'on est encore vivant, qu'on a encore les pieds sur terre, probablement l'un des sens de still walking. La marche comme condition des vivants, mais la marche aussi comme communion avec les morts - c'est le principe de la tradition. C'était là avant et ce sera là après, autre sens de still walking. Communion avec un mort en particulier, le frère aîné, dont l'absence hante tout le monde. Pire que l'arlésienne celui-là.
Plus que de montrer que toutes les familles se ressemblent, qu'il y a des secrets, des non-dits et de l'inachevé dès qu'il y a parents et enfants, la force du film de Kore-Eda Hirokazu aura certainement été de donner à voir la puissance des rites. Et en quoi ils nous dépassent.
dimanche 3 mai 2009
Guignol contre le grand spectacle - Holiday, de George Cukor

On peut appeler ça la lutte des classe, mais à mon avis la confrontation dont Holiday est la mise en scène est bien plus simple. Ou plus subtile. Dans ce film de George Cukor, où Gary Grant donne la réplique à une superbe Katharine Hepburn, un peu avant The Philadelphia Story, on voit un jeune homme aussi méchu que farfelu embarqué dans le grand jeu des fiançailles avec une riche héritière (la soeur de Katharine Hepburn - vous voyez venir le drame.)
Vont s'opposer deux mondes, ou plutôt deux scènes. D'abord il y a la grande bourgeoisie américaine. Le décor consiste en grandes pièces marbrées, en escaliers majestueux et en smokings amidonnés. C'est sur cette scène, à l'ambiance assez guindée et pas très commode, il faut le dire, que débarque Johnny Chase, le personnage de Gary Grant. Forcément, celui-ci détonne d'entrée de jeu. Direct, il entre côté jardin au lieu de côté cour, mélange les registres dans ses répliques aux domestiques, et semble confondre cravate et noeud pap. Plutôt que de se laisser effrayer par le silence éternels des espaces infinis de cette grande demeure bourgeoise, Johnny Chase se met en mouvement, allègre dans les décors figés.

Une chambrée, ou un âtre, vient s'opposer à ces espaces interminables et inhospitaliers. Il s'agit de la salle de jeux, essentiellement habitée par l'originale de la famille, la soeur de la fiançée: Linda (Katharine Hepburn). On y trouve entre autre piano, percussions, livres, cheminée, flutes, chevaux en bois et - très important, nous le verrons après - un théâtre de marionnettes. C'est aussi un lieu qui a été déserté par le frère, qui y fit jadis fructifier ses talents artistiques, auxquels il renonça finalement sous l'impulsion de son père. C'est bien entendu en cet endroit que se rencontrent pour la première fois Gary Grant et Katharine Hepburn.
Car si les deux scènes sont un temps laissées à l'abandon, c'est bien vite que le jeu s'anime: les deux théâtres s'opposent, les deux spectacles s'affrontent. L'essentiel se passe pendant la réception en grandes pompes, donnée à l'occasion des fiançailles. Le couple cousin de la fiancée, parcourt de ses sarcasmes suffisants la foule des convives. Linda, dont l'absence est remarquée, a préféré rester dans cette salle de jeux qu'elle appelle sa chambre. Vont bientôt s'y retrouver Johnny Chase, le frère de Linda et le couple d'ami de Johnny, qui sont la simplicité même. Toutes sortes de petits jeux, burlesques pour la plupart - de la musique, des discussions, des gags - se mettent à former un contrepoint à la réception qui se tient dans l'étage du dessous. Le sommet de cette subversion du grand spectacle de la bourgeoisie est atteint quand les vieux amis, exact inverse du couple snob des cousins, se mettent au spectacle de marionnettes, dans lequel ils ont l'air de moquer le "grand jeu" des fiançailles.

Ce qui se passe, dans cette salle de jeux, ressemble à une révolte du burlesque contre la grande forme ou contre l'esprit de sérieux. Pourtant, si l'aspect comique est moins important dans Holiday que dans une comédie de Hawks par exemple, c'est aussi parce que Cukor montre la façon dont le burlesque, le petit jeu, l'excentricité, se laisse facilement engloutir par le grand spectacle du conformisme. Tragédie bourgeoise. Ainsi, même s'il y a le happy-end, on retient surtout le sourire résigné du frère Ned, au-dessus de son verre de champagne, celui qui a tout compris mais a préféré renoncer...
mercredi 29 avril 2009
T'as le look Coco (d'avant Chanel)

Il ne fait pas bon non plus être une femme, dans Coco avant Chanel. Quelles sont ces femmes qui ont besoin de couleurs et de frou-frou pour être femmes? Coco, elle, est simple, elle est libre. Anne Fontaine prend soin de filmer religieusement son aura d'authenticité, au milieu du cadre, au milieu de la foule. Peut-être que le sombre et le sobre lui vont bien au teint, à notre Coco, mais on ne peut pas s'empêcher de se dire que sa quête de simplicité préfigure la banalité du tailleur d'open-space. La patronne dictatrice perce déjà sous la Coco anarchiste. Bonjour tristesse.
dimanche 26 avril 2009
Ankara, nid d'espions - les petits détournements


Bien sûr, on a beau être en 1944, la guerre est comme absente de ce film d'espionnage. Ou du moins, la guerre n'est pas celle que l'on croit, ce n'est pas le Reich contre les alliés. Non, Von Papen, par exemple, est moins un représentant du nazisme qu'un aristocrate pur sang et serait bien plus proche, à l'écran, dans sa prestance, du lord d'en face, l'ambassadeur anglais, que de son subordonné Moyzisch. Les deux ambassades mises en miroir présentent à l'évidence la même structure, la même hiérarchie, le même ordre. La guerre véritable est menée par un homme, notre Cicéron (James Mason), qui cherche à subvertir cet ordre.

Ce détournement-là peut, si on a l'esprit suffisamment tordu, faire penser à un autre, qui se sert lui aussi d'un jeu d'apparences. Car que singe OSS 117, sngulièrement Le Caire nid d'espions, sinon ces bons mots échangés entre diplomates distingués, ainsi qu'un ordre esthétique bien déterminé? Hazanavicius, le réalisateur, est adepte du détournement - il est l'un des créateurs du Grand Détournement (avec des dialogues inventés sur des séquences de vieux films.) On pourrait dire qu'avec OSS 117 - Le Caire nid d'espion, il avait précisément tenté de subvertir un genre, le film d'espionnage, en s'inspirant très précisément des détails visuels et en plaquant par dessus un discours pataud, celui d'un personnage représentant tous les défauts de son époque. C'est dans cette exactitude fétichiste de la reconstitution que le procédé du détournement se distingue de la simple parodie: plus que des situations comiques, le rire vient d'un décalage entre ce qui se montre et ce qui se dit.

Le second OSS 117 (Rio ne répond plus) contient des références encore plus appuyées. Particulièrement dans ses effets, par exemple la multiplication des splitscreen ou cette scène de vertige pointant de façon insistante dans la direction de Vertigo. La tirade shakespearienne prononcée par le nazi fait penser à To be or not to be de Lubitsch - autre mascarade impliquant des officiers nazis - où les même vers sont dits par des personnages secondaires. En un sens, Hazanavicius détourne les codes esthétiques d'un genre comme James Mason, dans L'Affaire Ciceron, détournait l'ordre de la caste des diplomates. Les chutes comiques pour l'un, l'échec pour l'autre témoigneraient presque de la même vanité. Pour les deux, en tout cas, il est clair que Rio ne répond plus.