dimanche 1 mars 2009

The Wrestler - lord of the ring


Avant The Wrestler, Darren Aronofsky avait fait entre autre Requiem for a dream et The Fountain. L'un sur l'enfer de la drogue, l'autre sur la vie, la mort, l'amour. Une tragédie branchée, une metaphysic-fiction et maintenant un mélodrame "réaliste" sur le catch. Ça doit faire mal aux adducteurs des grand-écarts comme ça.

On s'étonne d'ailleurs, ici et là, des tournants stylistiques de ce jeune cinéaste excessif. C'est vrai qu'à force de tournants le cœur nous vient aux lèvres: des effets tape-à-l'œil de Requiem for a dream aux vertus méditatives de son hallucinatoire Fountain, ça part un peu dans tout les sens. Et nous voici arrivés, avec The Wrestler, à un cinéma apparemment sevré de ses outrances - photographie granuleuse, montage discret, filmage réaliste aux accents documentaires.

Mais dire cela serait oublier que nous parlons d'un film sur le catch - et le cinéma-réel de Darren Aronofsky c'est pareil que le catch, c'est du chiqué. Le film est fait comme on fait du catch: en multipliant les effets de réel, pour bien épater la galerie. Souvent les catcheurs vont se battre à côté du ring, près du public. C'est pour faire croire que c'est pas juste un show. Aronofsky, lui, veut déborder le cadre classique du mélodrame pour faire croire que c'est pas que du cinoche.

Le réel en question, le film n'y va pas par quatre chemin, c'est le corps, la chair. Chair meurtrie du catcheur, chair dénudée de la strip-teaseuse: peu nous est épargné de la triste condition de notre corps de mortel. Myckey Rourke a été débarqué pour incarner à lui seul cette déchéance physique, ce retour de flamme des feux de la rampe. Il a été accueilli comme il se doit, c'est-à-dire comme un messie, par les journalistes. La christologie que cette constatation entraîne se lit comme le nez cabossé au milieu de la figure. Il faut dire que c'est tout une histoire ce corps gonflé, dopé, torturé, raccommodé. Le catcheur à la retraite a quelque chose d'un monstre - créature de Frankenstein au mieux, au pire simple femme à barbe (avec chevelure blond platine.) Et l'allusion, ressassée pendant tout le film, à la Passion de l'agneau, "bélier", ou bouc émissaire, prend avec ce freak une tonalité inédite. Car c'est sur l'autel du pur spectacle que ce corps s'offre en sacrifice.

En effet, les sorties de piste des vrais faux combattants ne durent jamais bien longtemps. Tout l'effort, pour le cinéaste comme pour Randy, notre personnage de catcheur, revient finalement à ramener de force la réalité dans l'enclos du ring, dans l'enclos du show. Aussi est-ce bien à un mélodrame que nous avons affaire. Parce que notre catcheur aura servi trop longtemps la viande habituelle et parce que, pesanteur, il aura attendu trop longtemps d'être visité par la grâce, il se contentera finalement de se jeter à nouveau sous les cordes du ring pour rejouer encore la même comédie. La dernière.

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