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vendredi 30 novembre 2012

Tunicolor

Ce qu'il y a d'amusant, dans les Tuniques écarlates de Cecil B. DeMille, c'est le fétichisme de la couleur. Ce fut apparemment l'argument commercial de ce film en technicolor, mettant en scène la police montée canadienne qui porte cet uniforme. La couleur écarlate confère aux tuniques un pouvoir magique : c'est d'un côté ce qui soude les troupes dans un sentiment d'appartenance et de loyauté à la couronne, et c'est de l'autre côté ce qui impose le respect, par exemple aux indiens. Couleur sacrée, donc, mais aussi couleur maudite. Il y a toujours ce risque, pour qui porte la tunique écarlate, d'être à découvert face à l'ennemi. Impossible de se camoufler : l'écarlate attire le sang, comme par un jeu de ressemblance. 

L'écarlate peut surgir en des moments inattendus. Gary Cooper enlève sa chemise et révèle un maillot de corps rouge : les canadiens ne tardent pas à lui faire remarquer qu'il est ainsi presque des leurs. Et toujours cette dangerosité de la couleur. Pendant un duel comique entre deux amis (l'un partisan des tuniques rouges, l'autre partisan des métis), l'un des deux perd son pantalon, laissant apparaître un caleçon rouge : il est abattu immédiatement, le face à face passant sans transition du burlesque au tragique.

Dans l'évidence du rouge écarlate, symbolisant dans le film une belle et dangereuse quintessence de la visibilité, on pourra voir toutes les couleurs rassemblées. L'air de rien, sous les traits d'un western mineur grignoté par la comédie, le film nous dit quelque chose de la magie et de l'ambivalence du technicolor.

lundi 8 juin 2009

El Dorado, de Howard Hawks - misères de l'impuissance



A propos d'El dorado, on fait souvent remarquer, à raison, les similitudes avec Rio Bravo. De ces deux westerns de Howard Hawks, celui qui nous intéresse ici est le plus tardif, ce qui n'est pas anodin, quant à ce qu'est devenu le cow-boy dans la mythologie du western.

Le cow-boy est par excellence celui qui fait, celui qui exécute, c'est ce que nous nous disions à propos de L'Homme de la Plaine, d'Anthony Mann. Reliquats du western classique, John Wayne et Robert Mitchum sont deux variations de cette figure de puissance. L'un est chasseur de primes - force sauvage, mercenaire, mise au service du bien - l'autre est shériff - c'est-à-dire seule puissance vraiment légitime. Entre eux, dès le début, et en guise de présentation, il y a un fusil qui, une fois la tension lâchée, passera de mains en mains, comme entre frères d'arme.

Mais John Wayne et Robert Mitchum sont déjà deux vieux. Et ils sont travaillés de l'intérieur, l'un par une balle reçue (d'une femme!), l'autre par l'alcool. Impuissance et paralysie dévorent petit à petit les deux compères. En lieu et place de son revolver, Mitchum se retrouve bouteille en main, au saloon, alors qu'il est provoqué et moqué par ses adversaires. Quant à John Wayne, il doit littéralement passer l'arme à gauche pour en imposer encore un peu. Tous ces petits ennuis d'impuissance, qui gangrènent l'action de ce western, ressemblent à des signes. Le film date de 1966, on est déjà dans les sixties, et le passage de la puissance à l'acte commence déjà à se dérégler, de l'autre côté de l'écran.

La puissance est toujours au western question d'armes. Aussi, du couteau au pétaradant pistolet, James Caan apporte-t-il sa jeunesse au film d'Howard Hawks. Voici des gestes neufs, inattendus - comme lorsqu'il se jette sous les chevaux pour attaquer les cavaliers - en même temps qu'explosifs et parfois approximatifs (son pistolet semble éclater à chaque fois qu'il tire et il blesse à la fin John Wayne par erreur...)


Toute cette jeunesse ne nous enlèvera pas l'impression que la figure du cow-boy a été atteinte. Peut-être est-ce avec El Dorado qu'aura fait son apparition le western rongé par sa propre fin tel que nous le connaîtrons, au moins, jusqu'à Unforgiven?