vendredi 4 septembre 2009

Inglorious Basterds, de Tarantino - le comique, c'est du sérieux.


Peut-être que l'une des voies de sortie aux éternels débats sur Tarantino serait d'admettre une fois pour toute qu'il fait dans le comique. Du comique où le rapport aux choses est tellement fantasmé - passé au tamis si resserré des registres et références - que c'est la dérision généralisée qui l'emporte. C'est probablement dans Inglorious Basterds que ceci ressort le plus.


Ce film ressemble à un jeu dont les règles changeraient à tout moment. Et pas seulement dans le style (comédie, western et, si peu, film de guerre) ou dans les citations (je renonce à en faire la liste), mais dans l'utilisation subtile des langues: du Français, de l'Allemand, de l'Anglais, de l'Italien. Il y a ce très curieux moment, dans la toute première scène, où celui qui sera de fait le personnage principal, le colonel SS (Christoph Waltz), déclare avec force effets d'annonce qu'il s'apprête à passer du Français à l'Anglais pour poursuivre la conversation - c'est comme ça que ça se passe dans Inglorious Basterds, on change de langue au milieu de la conversation. Avec les langues il y a aussi tout un jeu de rôles qui se met en place, qui va de la carte sur le front au folklore des uniformes nazis, en passant par l'italien délicieux d'Aldo, le personnage de Brad Pitt - les limites de ta langue définissent celles de ton camp. Des uniformes et des postiches qui font aussi penser aux jeux dangereux de Lubitsch (To be or not to be).


Il n'y a pourtant pas que ça: on voit bien que tout ne s'émiette pas au moulinet de la dérision. Chez Tarantino, le comique, c'est du sérieux. Et ce sérieux brûle la comédie par les deux bouts: d'un côté il y a des instants de pure tension, des moments où, contre toute attente, Tarantino semble avoir foi en ce qu'il montre et de l'autre côté il y a des conclusions qui semblent venir de la dérision généralisée, une sorte de propos sur le cinéma et sur le pouvoir que donne sa maîtrise totale. Bref, voici une comédie prise entre une piété superstitieuse (on y croit parce que c'est le cinéma) et l'affirmation de la domination du cinéma sur la vie (et de Tarantino sur le cinéma). Parfois Tarantino est le pieux cinéphile, qui croit dans les purs moments de cinéma et parfois il est le cinéaste mégalomane, persuadé qu'il fait ce qu'il veut avec le cinéma - parfois il est Mélanie Laurent, qui prend soin de bien disposer les lettres du film projeté dans sa salle et parfois il est Mélanie Laurent foutant le feu au cinoche, la réalité avec.

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