jeudi 29 juillet 2010

Control: Ian Curtis en noir & blanc


La justesse de Control - le film d'Anton Corbijn sur Ian Curtis, l'emblématique chanteur de Joy Division - pourrait tenir dans le seul choix du noir et blanc. Ou plutôt dans la lutte du noir et blanc contre le gris.

Le gris, c'est la banlieue industrielle anglaise avec ses barres d'immeuble. C'est l'environnement de nuages et de bitume qui menace d'apathie ceux qui l'habitent. C'est aussi, bien sûr, le gris des images d'archive qui sert à embaumer les légendes comme celles de Joy Division et de Ian Curtis - au risque de les neutraliser. Ce gris-là est une absence de couleur.

Mais Control est surtout l'histoire d'un jeune exalté et d'un chanteur désespéré: un film dans lequel s'opposent le blanc et le noir. Car Ian Curtis est d'abord un candide. Un blanc-bec rêveur, qui se marie et se passionne pour la musique dans un même élan vital. Un élan qui se retourne pourtant contre lui - et finit par distiller dans le film une noirceur de mort. Le symbole de ce retournement mortifère restera probablement, dans la maternité, ce plan sur le berceau, métaphore du nouveau-né et de la vie qui s'annonce - en même temps qu'effrayant réceptacle d'un trou noir et stérile.

A partir de cet instant, le film devient un combat de crises et de larmes entre l'enthousiasme naïf et la pulsion de mort, entre l'amour et la mauvaise culpabilité. Une esthétique noire et blanche de l'épilepsie qui va très bien à Ian Curtis.

She's lost Control, version live et version Control.


4 commentaires:

  1. Bizarrement, un film qui n'a pas eu l'air de trop plaire aux fans, mais il est bon de rappeler ses qualités cinématographiques !
    Les curieux pourront aussi se pencher sur le plus funky 24 Hour Party People de Michael Winterbottom (qui sort The Killer Inside Me ces jours-ci)...

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  2. Personnellement - et en tant que fan de Joy Division -, j'avais beaucoup aimé Control et notamment son esthétique. Il est en tout cas nettement plus réussi que le documentaire consacré au groupe sorti en début d'année dernière (sans intérêt en dehors, bien sûr, de la bande-son). Quant à 24 Hour Party People, dans un registre moins grave, c'était un film agréable.

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  3. Contrairement au premier commentateur, il me semble, moi, que le film a été bien accueilli, y compris par les fans de Joy Division (dont je fais partie). Du moins, il a été vu avec un certain "soulagement", on se disant : "Ce n'est pas si mal...".
    En effet, on peut y voir, dans sa sobriété dramatique, dans son parti-pris esthétique, dans son respect de la musique et dans la qualité de l'interprétation(-imitation ?), une réussite dans les "limites" du biopic musical. Compte tenu du sujet et du choix de coller vraiment à la réalité, on se dit qu'en fait ça n'aurait guère pu être mieux fait.

    Je rejoins l'avis des autres sur le Winterbottom, digne d'intérêt lui aussi (pour ceux qui les ont vu, les deux films semblent inséparrables : au moment de la sortie ciné de Control, j'avais évoqué les deux titres ensemble dans ma note d'alors).

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  4. @Ben Brunet, j'avais vu 24 h party people il y a longtemps, il y a des passages qui se répondent, mais je me souviens que c'était plus funky effectivement! En tan que fan tardif de Joy Division, je dois dire que Control a bien relancé mon intérêt.
    @Ran, je n'ai pas vu le fameux documentaire, mais je trouve ce film réussi, surtout dans la mesure où le réalisateur se contente de nous immerger dans l'univers du groupe, c'est simple et efficace.
    @Ed, ton second paragraphe colle tout à fait à mon impression. Quoique de mon côté je ne suis pas arrivé en fan de Joy Division (j'aime beaucoup, mais je n'avais jamais vraiment approfondi), et c'est au contraire en voyant le film que j'ai eu l'impression de comprendre leur musique. Il y a donc aussi une efficacité pédagogique!

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