dimanche 8 février 2009

L'Etrange histoire de Benjamin Button et de David Fincher



"What we call the beginning is often the end
And to make and end is to make a beginning.
The end is where we start from.
And every phrase
And sentence that is right (where every word is at home,/
Taking its place to support the others,
The word neither diffident nor ostentatious,
An easy commerce of the old and the new,
The common word exact without vulgarity,
The formal word precise but not pedantic,
The complete consort dancing together)
Every phrase and every sentence is an end and a beginning,
Every poem an epitaph.
And any action
Is a step to the block, to the fire, down the sea's throat
Or to an illegible stone: and that is where we start
."

T. S. Eliot, Four Quartets, "Little Gidding", V

L'image, ce n'est pas nouveau, a quelque chose du tombeau. Quelque chose de cette pierre muette, sans épitaphe, ou à l'épitaphe illisible - "an illegible stone". Encore plus que la parole, la représentation donne un semblant de vie à ce qui n'est pas, à ce qui n'est plus. En soumettant l'étrange cas de Benjamin Button à nos yeux crédules, David Fincher aura sans doute voulu nous parler du temps. Pas directement le temps avec un grand T, et c'est là tout son mérite il me semble, mais d'abord le temps du récit. Le récit, l'histoire de Benjamin, est lu dans un journal à une vieille dame sur le seuil de la mort. Pas étonnant qu'il naisse vieux ce pauvre garçon: ce qui est vieux, poussiéreux, c'est la voix de celui qui, de très loin, de la mort, raconte sa propre naissance. Comme si le temps du conteur, sa vieillesse, par une étrange distorsion, se lisait sur les traits de celui dont on regarde l'histoire. En un sens, cette vie à l'envers, c'est le récit qui dit ce qu'il est, le cinéma qui se regarde en face - le temps qui commence et se termine avec la mort.

Alors si l'on succombe facilement à ce vertige, on regrette aussi les quelques manies visuelles et la philosophie émue du carpe diem. On se dit parfois que Fincher se trompe de mélodrame.


1 commentaire:

  1. Dans l'ensemble, ce film m'a paru complètement raté. A part l'idée mal exploitée de cette vie inversée, tout m'a ennuyé; le cadre narratif de la grand-mère dans son lit d'hôpital, le personnage joué par Blanchett, toutes les scènes où le couple est ensemble. C'était long et douloureux et même la présence de brad Pitt se révélant peu à peu n'a pas su égayer les longueurs de cette biographie.
    Mais au moins cela m'a permis de découvrir ce poème de T.S Eliot qui lui est très beau.

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