dimanche 14 juillet 2013

Prince avalanche - marquages au sol qui ne mènent nulle part

Il y a deux histoires, deux théâtres, dans Prince avalanche. La première est celle d’une nature qui reprend ses droits dans une région américaine dévastée par les incendies. La seconde est celle de deux personnages posés là, sans trop d’explications, avec du matériel de marquage au sol. L’intérêt du film se situe au croisement de ces deux histoires. 

David Gordon Green, cinéaste à deux têtes, est à la fois l’esthète d’une Amérique délabrée (dans un film comme George Washington) et auteur de comédies régressives à la Judd Appatow (dans un film comme Pineapple Express). Avec ce nouveau film, il semble ne pas choisir entre ces deux voies. D’un geste timide et non dénué de charme, il hésite entre la contemplation du règne végétal et la comédie en sourdine. 

Si ce côté mou et tâtonnant peut décevoir, c'est pourtant ainsi que Prince avalanche parvient à nouer quelque chose entre le lieu et ses personnages. Ces deux bonhommes, perdus comme des playmobils au fond d'un bois (avec leurs tenues colorées, leur véhicule, leur casques de chantier, leur outillage varié), ont autant de raison de faire ce qu'ils font (du marquage au sol) que les arbres de pousser, ou les insectes de se déplacer. C'est le versant absurde et un peu paresseux d'une réflexion malickienne sur la raison d'être de personnes, de plantes, d'objets ou même des ruines.

Dans des ruines justement, il y a un joli passage où le personnage principal (Paul Rudd) rencontre une dame en quête de souvenirs dans ce qui reste de sa maison. La séquence dégage une forme de mélancolie, comme si notre personnage prenait conscience qu'il n'était lui aussi qu'un fantôme en sursis. Un être improbable avec sa moustache et son casque de chantier au milieu de la forêt : il pourrait ne pas exister, à la limite ce serait plus logique. Plus tard il résume cela par un : "I'm impossible". Cette qualité fantomatique de l'existence passe aussi par un jeu de couleurs. Ce sont notamment les couleurs artificielles des tenues et du marquage, qui font l'objet de détournements semi-poétiques dans lesquels des arbres, des chaussures ou la route se retrouvent colorés en jaune ou en bleu. 

Ce n'est ni la fontaine qui colore de rouge la nature, ni les routes de campagne qui ne mènent de nulle part, mais il y a quelque chose de tout ça dans ce Prince Avalanche, film mineur, rarement drôle et souvent amer.

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