jeudi 23 septembre 2010

Les Amours Imaginaires, de Xavier Dolan - le bâton pour se faire batte


Un peu timide mais à l'aise dans sa récente aura de petit génie, à la mode jusqu'au bout des cheveux, Xavier Dolan, l'auteur de J'ai tué ma mère, présentait ce lundi 20 septembre au mk2 bibliothèque l'avant-première de son second film : Les Amours imaginaires. Il introduit ses acteurs - amis dans la vraie vie - et finit d'achever un public déjà conquis, au moyen d'un accent québécois léger comme il faut. Faut-il que nous ayons vraiment mauvais esprit pour avoir gardé en mémoire, pendant le film, son charmant lapsus : "nous sommes ravis de vous présenter ce produit... euh, enfin, ce film"? Nous disons là une méchanceté : le jeune homme s'est corrigé immédiatement, c'est tout à son honneur.

C'est tout à son honneur, aussi, d'avoir habillé l'ensemble de son produit/film avec une combinaison cinéphile des plus séduisantes. Et vintage de surcroît. En résumé: d'interminables ralentis musicaux, façon Wong Kar Waï du pauvre. Un clip n'a pas le temps de s'arrêter qu'un autre commence. Tout est sur-habillé, sur-maquillé, sur-packagé, les scènes de fesse font si peur à notre petit génie qu'il met des calques de couleur. Tellement pop. Avec en plus les suites de Bach par Yo Yo Ma. So chic.

Le film "revisite le trio amoureux", nous dit le dossier de presse. C'est l'histoire de Francis et Marie, des amis, qui tombent amoureux de la même personne : Nicolas. Oui, on a saisi les références cinématographiques, c'est bon. Sauf que là Xavier Dolan décide de simplifier l'affaire: Nicolas sera une sorte de dieu grec inaccessible, quand les deux autres s'échineront à le séduire. Voilà, tout est dit, la situation ne changera pas d'un poil puisque le réalisateur sera trop occupé à filmer des regards au ralenti.

Il n'est pourtant pas sans talent, l'animal. Il y a notamment ces petits monologues conçus comme des interview, qui font penser à du bon Woody Allen. Le tort de Dolan est peut-être d'avoir refusé la voie purement comique, pour s'essayer maladroitement à la démonstration cinématographique. Et il y est presque parvenu dans cette impressionnante séquence épileptique rythmée au stroboscope: une hypnose de fin de soirée qui sublime le fameux Nicolas et l'entoure d'une musique entêtante. Las, ce moment ne dure pas bien longtemps... Et quand le personnage de Francis commente le style de son homologue féminine d'un "c'est pas parce que c'est vintage que c'est beau" on se dit que ce Xavier Dolan tend décidément le bâton pour se faire battre.

7 commentaires:

  1. Le soucis, c'est que tomber amoureux d'un Nicolas n'est plus au gout du jour... Même d'un dieu grec sans talonnettes...

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  2. Merci! Un grand merci de ne pas encenser cet ado bobo prétentieux!

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  3. Merci pour vos remarques chers anonymes, tout le plaisir fut pour moi!

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  4. Ah la la, les goûts et les couleurs...

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  5. En même temps, on n'a pas trop envie de s'acharner sur Dolan, justement par qu'il le tend vraiment son bâton (sans horrible jeu de mot par rapport à une séquence du film). Presque chaque dialogue, chaque référence, chaque effet, on pourrait les retourner contre lui. C'en est désarmant...

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  6. J'ai lu que vous vous sentiez seul chez Ed. Chez De son Coeur, Ran n'a pas goûté non plus et les commentaires qu'il a ensuite laissé ne font que confirmer son impression.
    Si ça vous intéresse : http://desoncoeur.over-blog.com/article-les-amours-imaginaires-58120153.html

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  7. @Ed et Nolan, comme je sui allé le redire chez De son coeur, il y a quand même cette scène au stroboscope dont je parle dans l'article, qui m'a assez impressionné. Peut-être est-ce grandiloquent et facile, mais j'ai quand même trouvé ça joli à voir.

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